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Isabelle Pinçon par Livres-Addict.fr
"C?est curieux" d?Isabelle Pinçon (Cheyne éditeur)
Isabelle
Pinçon n?y
va pas parquatre chemins et, en même temps, elle brouille toutes les
pistes.
L?objet de sa curiosité, de sesinvestigations, de son affection est clairement désigné et ciblé : c?estl?homme familier qui est, dans le même temps, parfaitement étranger.
Et l?angle d?approche privilégieexclusivement ce dernier aspect : l?insolite, l?incongru, l?altérité quisaisit, interloque, presque suffoque et souvent prête à rire.
C?est que le regard d?IsabellePinçon décape la vision de toute afféterie, de toute paresse, de toute convention. C?est un regard radiant qui perce toutes les poches ettoutes les coques de confort et d?aisance autoroutière. Un regard qui fait éclaterles bulles perceptives protectrices. L?homme paraît mais tel qu?on ne l?ajamais vu.
On voit tout de suite par oùIsabelle Pinçon prend son homme : par la stupéfaction qu?il lui inspire.Les locutions « c?est curieux » ou « curieusement » quiscandent toute tentative d?approche l?attestent. Et on est face, là, à d?improbables et détonants précipités chimiques catapultés de page enpage.
L?homme est celui par qui lasurprise arrive et sans cesse se renouvelle.
La narratrice observe l?hommecomme une contrée étrangère, exotique, inhabitable. Elle le scrute comme unecréature ovniesque et il ressort de cette scrutation que l?homme est un recelde manies, de bizarreries, de pratiques indéchiffrables. Mais la narratrice nes?offusque ni ne se formalise de ces agissements obscurs, de ces étrangetésrépétées. Elle s?en amuse, elle prend acte et en rend compte à travers desformules perplexes et cocasses. L?interrogation latente qui sous-tend le texte,c?est « Comment peut-on être un homme » un peu à la manière du fameux« Comment peut-on être persan ? ».
L?homme est saisi dans sespratiques quotidiennes lesquelles apparaissent inusitées et bizarres au possible. C?est que ledit quotidien, dans le regard de la narratrice,se mue en autre chose : on a le sentiment que l?homme opère pour ainsi diredans le champ du fantastique.
Et ce qui affleure, dans lestraits loufoques et la riante comédie, c?est une poignante inquiétude et unedéchirure intime : quelque chose comme l?impossibilité foncière, ontologique, à rejoindre cet homme tellement autre et si ovniesque.
La langue est diablementinventive, tissée de fragments poétiques, d?éclats facétieux et émouvants.
Un texte sans pareil.
BH 09/12