Ce sont des images
de
grand souffle et de fièvre lente. Des figurations de l'offrande, des
corps ouverts au passage, à l'étreinte du grand Autre et saisis dans
ces isntants de dépossession qui les relient au sacré.
L'exposition s'intitule "Le don" et elle rassemble des photos de Giorgia Fiorio, laquelle a sillonné le monde des années durant à la recherche d'images qui disent la quête du divin et la transcendance incarnée.
De l'île de Pâques aux Philippines, des hauts plateuax andins en Turquie où officient, chez les soufis, les derviches tourneurs, Giorgia Fiorio capte, sur une pellicule vibrante, des images chargées d'âme, saturées de sens.
Elle saisit les
corps
marqués, stigmatisés, transfigurés par les rites religieux.
On voit des corps artistement balafrés par des peintures rituelles, on voit des Philippins qui miment et restituent toutes les étapes de la crucifixion, on voit le vertige des derviches entransés, on voit, en Indonésie, un visage multiplement transpercé de part en part car dédié, on voit, photographié en Inde, dans un espace désert, le corps nu d'un brahmane, corps tout de verticalité qui dégage une telle charge spirituelle, une telle évidence mystique, qu'il magnétise le regard absolument...
Ces corps, ces visages, cueillis dans leur rapport au sacré, pris dans un moment d'altération, d'élévation réelle ou désirée, appellent et interrogent. Ce qu'on voit, ce n'est pas seulement la variété, la multiplicité des rites, c'est la persistance, d'un pays à l'autre, d'une culture à l'autre, d'une même aspiration, fondatrice de l'humain : le désir de s'unir à plus grand que soi.
Les photos, en noir
et
blanc, sont d'une rare noblesse. Elles relèvent du grandiose, mais du
grandiose nu, sans qu'il y ait aucunement recherche d'effet.
Le don, c'est celui que font de leur être ces hommes, ces femmes assoiffés de divin, c'est ainsi celui qu'a consenti la photographe qui a payé de sa personne pour sonder ce mystère fondamental et c'est celui qu'elle nous fait, à nous, spectateurs, en nous offrant cette enfilade d'images si habitées.
BH 04/09